Autrefois, il y a quelques décennies, la plupart des foyers de nos villages faisaient leur pain eux-mêmes.
Le samedi matin y était consacré. La fournée devait couvrir les besoins de la semaine et l'on faisait en sorte de s'organiser pour ça. Mais si la jonction ne se faisait pas, notre pain des pauvres, la farine de châtaignes, était là pour assurer la relève ..." . eramu un vèneri sera, di pane manc'un bucone !!! " -c'était un vendredi soir et plus un morceau de pain-.
Commençons par la matière première, la farine (u fiore).
Pour les familles modestes il fallait l'acheter. Le fournisseur habituel, dont le dépôt se trouvait à Bisinchi, était la Maison Lombard dont l'enseigne existe encore aujourd'hui, pour quelques autres, mieux nantis, elle provenait de leur production et pour certains du troc de leurs semis, olives, poteries etc .
Premier travail, la passer au tamis (u stacciu) dit 'u camellone' dont le fabricant local se trouvait à Orezza. Il s'agissait d'un ustensile de 50 cm de diamètre doté d'une maille fine montée sur un châssis en bois 'u cassinu'.
Puis pétrir la pâte, de laquelle, d'une semaine pour l'autre, une motte était prélevée pour être incorporée à la préparation de la semaine suivante et servir de levain.
Le vendredi soir donc, dans un coin de la 'meria' (la maie) -meda, disent nos compatriotes du Sud- cette boule de pâte (le levain) était délayée puis recouverte de farine pour la nuit. Le lendemain matin elle était incorporée à la préparation : farine, eau, sel, tout simplement.
Après une heure environ, une fois levée, vient le pétrissage. Celui-ci se fait à la main, travail assez pénible qui nécessite 'de la poigne' pour effectuer un mélange parfait.
Puis, une heure après, la 'spianera'. Sur la pâte, ramassée au fond de la meria à l'aide de la 'consula' -spatule en métal- on prélève un pâton façonné pour confectionner deux pains de forme oblongue. Le reste de la fournée suit le même processus, la 'tachera' pose sur sa tête le plateau contenant une vingtaine de pains et se rend au four. Une fois cuit ceux-ci sont placés sur le même couvercle puis, à la maison, rangés dans la partie basse de la meria qui sert alors de huche.
Mais, pour cuire ce pain, il faut des fours ... Il y en avait sept à Canaghja qui comptait alors une centaine d'habitants. Leur utilisation se faisait à tour de rôle dans un ordre établi et selon une entente entre les utilisatrices afin que chacune d'entre-elles dispose du temps nécessaire pour programmer son travail, du pétrissage à l'enfournement.
Revenons au four. Il fallait tout d'abord le chauffer. On utilisait pour cela un ou deux fagots de bruyère sèche pour lancer l'allumage et du bois de chêne ou d'arbousier pour monter la chauffe. Au premier intervenant, généralement le propriétaire, incombait la tâche la plus lourde : porter la température à plusieurs centaines de degrés. On considérait qu'elle était atteinte lorsque les fers qui supportent la trappe d'entrée commençaient à rougir. Les utilisateurs suivants auront moins de mal, il leur suffira de quelques brassées pour retrouver la température nécessaire.
Il faut ensuite se débarrasser des braises. On utilise pour cela un balai fait de touffes de ciste fixées sur une longue perche 'a mundulaghja'.
L'enfournement se fait de la manière la plus simple à l'aide d'une longue pelle en bois de châtaignier 'a pala'.
Mais le four ne sert pas seulement à faire du pain. A Pâques, tout d'abord, on y cuit les "migliacci" c'est à dire, pour ceux qui ne savent pas, ces galettes garnies de fromage frais, dorées à l'œuf et étalées sur des feuilles de châtaigner entrelacées.
Tous les invités sont là pour les déguster sitôt sortis du four, le vin, la joie d'être ensemble chauffent les corps et les cœurs dans une ambiance amicale et généreuse.
Il sert aussi à sécher les châtaignes une fois débarrassées de leur première peau et avant d'aller au moulin pour devenir farine. A y cuire les ustensiles en terre amiantée que fabriquaient nos anciens, pinghjule, tiani, testi frissoghje etc ...
Occasionnellement à y faire flans, fiadone, canistrelli voire même, servir de sauna pour provoquer une suée salvatrice !!!
Depuis belle lurette les fours ont perdu leur utilité car le boulanger porte désormais à domicile le pain de sa fabrication. Il est blanc, a belle apparence est consommable le jour même mais moins le lendemain !!!
Quant à nos fours, seuls quelques uns sont encore debout, les autres, comme les bâtiments qui les abritent se sont écroulés, les moulins qui les alimentaient ont subi le même sort et nos châtaigniers se dessèchent victimes d'un maléfique insecte.....
.... avec les conseils et les souvenirs de Zia Santa qui a pétri tant de fournées !!!
Le samedi matin y était consacré. La fournée devait couvrir les besoins de la semaine et l'on faisait en sorte de s'organiser pour ça. Mais si la jonction ne se faisait pas, notre pain des pauvres, la farine de châtaignes, était là pour assurer la relève ..." . eramu un vèneri sera, di pane manc'un bucone !!! " -c'était un vendredi soir et plus un morceau de pain-.
Commençons par la matière première, la farine (u fiore).
Pour les familles modestes il fallait l'acheter. Le fournisseur habituel, dont le dépôt se trouvait à Bisinchi, était la Maison Lombard dont l'enseigne existe encore aujourd'hui, pour quelques autres, mieux nantis, elle provenait de leur production et pour certains du troc de leurs semis, olives, poteries etc .
Premier travail, la passer au tamis (u stacciu) dit 'u camellone' dont le fabricant local se trouvait à Orezza. Il s'agissait d'un ustensile de 50 cm de diamètre doté d'une maille fine montée sur un châssis en bois 'u cassinu'.
Puis pétrir la pâte, de laquelle, d'une semaine pour l'autre, une motte était prélevée pour être incorporée à la préparation de la semaine suivante et servir de levain.
Le vendredi soir donc, dans un coin de la 'meria' (la maie) -meda, disent nos compatriotes du Sud- cette boule de pâte (le levain) était délayée puis recouverte de farine pour la nuit. Le lendemain matin elle était incorporée à la préparation : farine, eau, sel, tout simplement.
Après une heure environ, une fois levée, vient le pétrissage. Celui-ci se fait à la main, travail assez pénible qui nécessite 'de la poigne' pour effectuer un mélange parfait.
Puis, une heure après, la 'spianera'. Sur la pâte, ramassée au fond de la meria à l'aide de la 'consula' -spatule en métal- on prélève un pâton façonné pour confectionner deux pains de forme oblongue. Le reste de la fournée suit le même processus, la 'tachera' pose sur sa tête le plateau contenant une vingtaine de pains et se rend au four. Une fois cuit ceux-ci sont placés sur le même couvercle puis, à la maison, rangés dans la partie basse de la meria qui sert alors de huche.
Mais, pour cuire ce pain, il faut des fours ... Il y en avait sept à Canaghja qui comptait alors une centaine d'habitants. Leur utilisation se faisait à tour de rôle dans un ordre établi et selon une entente entre les utilisatrices afin que chacune d'entre-elles dispose du temps nécessaire pour programmer son travail, du pétrissage à l'enfournement.
Revenons au four. Il fallait tout d'abord le chauffer. On utilisait pour cela un ou deux fagots de bruyère sèche pour lancer l'allumage et du bois de chêne ou d'arbousier pour monter la chauffe. Au premier intervenant, généralement le propriétaire, incombait la tâche la plus lourde : porter la température à plusieurs centaines de degrés. On considérait qu'elle était atteinte lorsque les fers qui supportent la trappe d'entrée commençaient à rougir. Les utilisateurs suivants auront moins de mal, il leur suffira de quelques brassées pour retrouver la température nécessaire.
Il faut ensuite se débarrasser des braises. On utilise pour cela un balai fait de touffes de ciste fixées sur une longue perche 'a mundulaghja'.
L'enfournement se fait de la manière la plus simple à l'aide d'une longue pelle en bois de châtaignier 'a pala'.
Mais le four ne sert pas seulement à faire du pain. A Pâques, tout d'abord, on y cuit les "migliacci" c'est à dire, pour ceux qui ne savent pas, ces galettes garnies de fromage frais, dorées à l'œuf et étalées sur des feuilles de châtaigner entrelacées.
Tous les invités sont là pour les déguster sitôt sortis du four, le vin, la joie d'être ensemble chauffent les corps et les cœurs dans une ambiance amicale et généreuse.
Il sert aussi à sécher les châtaignes une fois débarrassées de leur première peau et avant d'aller au moulin pour devenir farine. A y cuire les ustensiles en terre amiantée que fabriquaient nos anciens, pinghjule, tiani, testi frissoghje etc ...
Occasionnellement à y faire flans, fiadone, canistrelli voire même, servir de sauna pour provoquer une suée salvatrice !!!
Depuis belle lurette les fours ont perdu leur utilité car le boulanger porte désormais à domicile le pain de sa fabrication. Il est blanc, a belle apparence est consommable le jour même mais moins le lendemain !!!
Quant à nos fours, seuls quelques uns sont encore debout, les autres, comme les bâtiments qui les abritent se sont écroulés, les moulins qui les alimentaient ont subi le même sort et nos châtaigniers se dessèchent victimes d'un maléfique insecte.....
.... avec les conseils et les souvenirs de Zia Santa qui a pétri tant de fournées !!!